Previously on ... Narcos
S’il est une chose impossible de nier, c’est que nous vivons une nouvelle grande ère des séries. S’il est encore trop tôt pour en tirer des conclusions sur le plan qualitatif, un flot de nouvelles séries arrive et il est difficile de ne pas se noyer, tant les propositions sont diverses. Cette massification des programmes est évidemment la conséquence des succès gigantesques des séries étendards des chaînes du câble américain. Aujourd’hui Breaking Bad ou Game of Thrones sont rentrés dans l’imaginaire collectif. Il est donc normal de voir apparaître de nouveaux acteurs dans la production de programmes, comme Amazon par exemple. Le poids-lourd du secteur est désormais Netflix, le géant américain du streaming légal qui possède un catalogue de séries absolument considérable et des moyens qui semblent illimités. C’est avec ces moyens que la société produit en masse des contenus originaux (ou pas), destinés à beaucoup des publics différents.
Avec Narcos, elle fait une entrée fracassante dans le monde de la série hispanophone, et rêve de conquérir l’Amérique du Sud où un gros marché est disponible. Le pari de créer une série sur l’histoire encore sanglante du narcotrafic en Colombie est osé, mais il se perd un peu en route, du fait de se narration distordue, remplie d’apartés et de digressions. Le public fidèle au plus grand programme d’HBO reconnaîtra Pedro Pascal, traumatisme générationnel dans Game of Thrones et campant ici le rôle d’un agent de la DEA. Si la voix-off de l’agent des stups américaine Steve Murphy est plaisante, son personnage d’un plat monumental agace malgré quelques moments de bravoure. On retiendra le fait qu’après plus de cinq années de vie en Amérique du Sud il ne sache dire que 3 mots d’espagnol. Cette figure un peu triste de personnage droit et juste est évidemment contre-balancé par son Némésis, le Pablo Escobar joué par un Wagner Moura impérial.
Toute la psyché et le charisme du personnage y est, ainsi que sa propension à être absolument cruel et détestable. Le genre de la série aurait-t-il trouvé son nouveau Tony Soprano ? Difficile d’adapter des faits réels et d’en même temps occulter les multiples massacres et attentats à la bombe dont a été coupable Escobar. La force de Narcos réside dans son traitement des différentes composantes de la société de l’époque : institutions, forces armées, narcotrafiquants, médias, tout y passe. La propension à mourir des personnages peut sembler banale pour une série moderne, mais elle reflète aussi la dureté de la société colombienne de l’époque, à mi-chemin entre un documentaire et une tragédie grecque.
Mais attention, Narcos ne semble pas être une série concentrée sur le personnage d’Escobar, mais veut se voir devenir une vision d’ensemble de l’histoire du trafic de cocaïne en Amérique du Sud d’après le showrunner de la série. Reste à savoir si la qualité restera lorsque Pablo, lui, aura disparu dans le cycle de violence qu’il aura lui-même enclenché. Wait and see…