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Live report : KVELERTAK, ANTHRAX, SLAYER

Cet article est destiné à tous. Il relate un concert de metal et utilise quelques termes spécifiques. Pour une meilleure compréhension, vous pourrez trouver un lexique à la fin du texte. Bonne lecture.



Il y a trois semaines, j’ai reçu un message de l’un de mes meilleurs amis me proposant d’aller voir gratuitement les groupes Kvelertak, Anthrax et Slayer le lundi 26 octobre au Zénith de Paris. Evidemment j’ai sauté sur l’occasion.

Dans la grande diversité des genres musicaux que j’écoute, le metal occupe une place importante, mais je n’écoute pas particulièrement ces trois groupes là. Malgré tout, Anthrax et Slayer sont des membres du célèbre « Big Four » du Thrash metal, une branche du metal apparue dans les années 80 qui, pour faire très simple, mélange la punk hardcore* et le heavy metal* plus classique. Le Big Four rassemble les quatre groupes qui ont été les chefs de file de ce mouvement et dont les deux autres membres sont Megadeth et Metallica, qui reste l’un des groupes de metal les plus connus à ce jour.

Mon ami me proposait donc d’aller voir deux légendes du genre en concert, ça ne se refuse pas. Qu’en est-il de Kvelertak ? C’est un groupe norvégien dont le succès est assez récent, leur style musical est une sorte de punk hardcore festive aux sonorités black metal*. Je ne vais pas rentrer dans les détails mais ça sonne plutôt très bien, je vous conseille chaudement leur single éponyme pour vous faire une idée.


Bon, donc ce concert ?

Le set s’est ouvert sur Kvelertak et si leur énergie et leur talent se sont fait sentir, plusieurs choses manquaient.

Premièrement, faire passer trois groupes en une soirée c’est long. Les organisateurs ont donc dû faire commencer le tout à 18h30. Le lundi, beaucoup de gens travaillent et se rendre au Zénith dès 18h30, ce n’est pas évident pour tout le monde donc il manquait une bonne partie du public pendant le concert de Kvelertak.

Ensuite, trois guitares, une basse, une batterie et un chanteur si le mastering* est mauvais, ça fait une soupe musicale sur laquelle on a presque du mal à reconnaitre les chansons. On peut en plus rajouter le fait que le micro du chanteur s’est arrêté pendant une quarantaine de secondes, et même si ce dernier a su régler le problème très rapidement, forcément, ça fait un trou. Certes, un incident technique, ça arrive, ce n’est pas très grave mais je trouve ça vraiment déplorable que les premières parties au Zénith soient systématiquement mal masterisées. C’est insultant envers le groupe qui joue et c’est insultant envers le public qui ne paye pas une place de concert 53 euros pour entendre du bruit, mais qui vient bel et bien pour de la musique.

Bref, la partie de Kvelertak m’a laissée sur ma faim, mais m’a ouvert l’appétit pour un éventuel passage en headlining* dans une petite salle parisienne ou pour un festival.


Après une pause d’une vingtaine de minutes, c’est Anthrax qui arrive. J’attendais le groupe car même si je ne le connaissais pas très bien, il est auteur de titres exceptionnels et parce que c’est l’un des premiers groupes de metal à avoir permis le mélange avec le monde du hip hop. Ils ont en effet sorti un EP avec le légendaire groupe de rap Public Enemy qui a ouvert la voie au meilleur (et un peu au pire aussi, mais on ne peut pas les blâmer).

Et Anthrax est la meilleure surprise de la soirée. Une énergie impressionnante se dégage du groupe en live, Joey Belladonna, le chanteur, court d’un coté à l’autre de la scène, balance son micro dans tous les sens et incite le public à chanter sur quasiment tous les titres. Le public est très réceptif et une très bonne ambiance règne sur les gradins et surtout dans la fosse où les pogos* énergiques et amicaux ne s’arrêtent que pour laisser place à un gros circle pit*.

L’un des plus gros succès d’Anthrax est leur reprise de la chanson «Antisocial» initialement composée par le groupe de hard rock français Trust. Alors quand l’un des plus grands groupes de thrash metal américain met toute son énergie dans la reprise d’un groupe français à Paris, forcément, ça marche sacrément bien ! Absolument tout le public chante et ça fait vraiment chaud au cœur.

A un niveau plus personnel, je suis vraiment satisfaite par le bassiste, qui nous gratifie de magnifiques solos, joués aux doigts et pas au médiator*. Il profite aussi de la moindre seconde pendant laquelle il ne joue pas pour envoyer des médiators à l’effigie du groupe au public.

La grande diversité dans la fosse (le pit*, pour les intimes) m’a agréablement surprise également. Alors qu’on a l’habitude de voir uniquement des mecs dont l’âge varie entre 16 et 30 ans, de nombreuses filles étaient présentes et toutes les générations étaient bien représentées.

La tension ne fait qu’augmenter jusqu’à la fin du concert, avec Anthrax qui parait infatigable. Mon seul regret aura été de ne pas connaitre toutes les paroles et de ne pas avoir pu chanter certaines chansons avec le reste du public…


Après une trentaine de minutes de pause bien méritées, qui permettent de souffler un peu et de faire plus ample connaissance avec ses voisins, les lumières s’éteignent à nouveau. Un grand rideau blanc a été tendu pendant l’entracte et c’est sur les premières notes de Repentless, single du dernier album du groupe que sont projetés des pentacles et autres croix renversées. Une symbolique chère à Slayer et qui aurait probablement beaucoup plu à Christine Boutin si elle avait été présente. Quand le riff* et la batterie commencent, le drap est lâché, j’ai Slayer sous les yeux.

J’avais beaucoup d’appréhension pour cette partie du set. Bien que Slayer ait indéniablement apporté beaucoup au monde du metal, j’ai toujours eu quelques réticences à propos de ce groupe.

Pour commencer, j’ai beaucoup de mal avec le personnage de Kery King, le guitariste soliste du groupe. C’est certes très subjectif mais entre les tatouages tribaux sur les bras et le crane, les flammes sur la guitare, les lunettes de soleil et les litres de polish qu’il doit s’appliquer sur le cuir chevelu pour que ce dernier brille à ce point, je ne peux pas m’empêcher de penser à la vague beauf/tunning des années 80 et forcément, ça n’aide pas.

Ensuite, j’avais vu plusieurs vidéos live de Slayer et bon, je ne veux pas m’acharner sur la tête du pauvre Kery King, mais le headbanging* quand on est chauve, ça fait un peu phallus au vent… Alors oui, je suis en train de plomber le niveau de mon article mais premièrement, je m’en fous, c’est le mien, et puis comme ça si un jour vous voyez Slayer en concert, je vous donne une bonne raison d’éclater de rire. Alors remerciez-moi.




J’ai en plus quelques réserves sur la production musicale de Slayer au fil des années et je fais partie de ceux qui leur reprochent de ne pas assez s’être renouvelés au fil du temps.

Pour finir avec l’appréhension, je craignais un peu le public de Slayer. C’est un groupe qui a une fanbase extrêmement solide et je craignais que la fosse ne soit pas très accueillante, voire franchement agressive.

Et bien j’ai été très agréablement surprise par Slayer ! Au début, je suis restée sur les gradins avec une amie et première remarque, la masterisation est tout à fait correcte. Le crane de Kery King m’évoque toujours la même chose mais force est de remarquer qu’il a de la présence en live. C’est aussi le cas de Tom Araya, le bassiste et chanteur du groupe, qui a beau être assez statique et jouer au médiator, impose un certain respect. Et les autres membres ne sont pas non plus en retrait.

Au bout de quelques minutes, à force de voir le pit grouiller comme un tas d’asticots humains, je cède à la tentation et me rends en plein milieu de la fosse à quelques mètres de la scène.

Et là encore, je me suis radicalement trompée en imaginant que le pit serait violent. Certes ça bouge vite et ça secoue et certes, rares sont les moments de calme. Mais comme d’habitude la moindre personne qui tombe est immédiatement relevée par une dizaine de mains salvatrices. Et pour ceux que l’agitation quasi constante du pogo fatigue, un slam* permet d’en sortir très rapidement, le tout en passant à moins de deux mètres de la scène. Il y a deux types larges comme des maisons qui font la courte échelle à qui leur demande, et catapultent sur commande la moindre personne sur la prairie de bras levés en l’air pour porter les crowdsurfeurs. C’est donc à deux reprises que je me suis faite porter vers la scène et que j’ai été accueillie par les body guards qui sont eux aussi gros comme des maisons et me soulèvent de la foule pour me poser au sol derrière la barrière avec une telle facilité que ma masse corporelle d’une soixantaine de kilos semble être réduite à quelques grammes.

Certes, je pense toujours que la discographie de Slayer n’est pas assez variée. Mais la durée du concert permet de largement l’oublier et je ne m’ennuie pas une seule seconde pendant le show.

Le nouveau guitariste rythmique du groupe, Gary Holt, porte son habituel T-shirt noir avec l’inscription blanche « Kill The Kardashians » qui montre bien qu’il s’est placé dans la dynamique du groupe. Et oui, Slayer c’est aussi ça. De la provocation sans limites, visant notamment la population puritaine et conservatrice américaine. Alors le groupe évoque le Satanisme sans réelle convictions ou motivation philosophique (ce que je trouve un peu dommage car cette imagerie peut être utilisée dans le cadre d’une réelle réflexion sur les rapports de l’homme au divin) écrit des chansons dont le refrain est « God hates us all », propose un dessin d’un Jésus estropié et mutilé en couverture de l’un de ses albums où encore évoque des sujets comme le terrorisme de manière assez crue. Et tout ça pour quoi ? Pour le plaisir de voir certaines personnes s’offusquer, crier au blasphème et les accuser de pervertir la jeunesse. Néanmoins cette provocation fait de moins en moins d’effet, les gens ayant compris qu’on cherchait juste à les faire jaser. Encore une fois, c’est une méthode qui ne s’est pas énormément renouvelée mais en live, ça marche diablement bien.




J’attendais avec impatience Rainning Blood, l’une des chansons les plus connues du groupe et son wall of death* traditionnel. Et je n’ai pas été déçue ! Pendant la longue introduction, plongée dans une obscurité presque totale, la fosse se sépare et la pression atteint son paroxysme. Après deux boucles du célèbre riff, la batterie, la guitare rythmique et la basse reprennent plein volume et les membres du public se ruent les uns sur les autres refermant le couloir formé pendant l’intro. Les gens sont tellement sérés que la fosse ressemble à un gros câlin général pendant quelques instants.

Lorsque le concert se termine, je suis vraiment satisfaite et les regards brillants et les sourires que j’échange avec le reste du public en train d’évacuer la salle me prouvent que je ne suis pas la seule.

Pour conclure, Slayer est un groupe dont la carrière est contestée et contestable. Mais ce n’est pas le cas de leurs performances scéniques, très solides et difficilement critiquables, qui ont joué en grande partie dans la constitution de leur vaste fanbase.



LEXIQUE



Punk Hardcore : sous genre du Punk reprenant ses caractéristiques principales (simplicité du jeu et de la structure, morceaux courts…) tout en accélérant le tout et en ajoutant le chant crié, voire hurlé.

Pour se faire une idée écouter Biohazard, Misfits et Terror.


Heavy Metal : ici, premiers groupes de metal, notamment britanniques, s’inspirant notamment du Rock, du Blues et de la musique classique.

Ecouter Black Sabbath, Iron Maiden et Judas Priest.


Black Metal : L’un des courants du metal les plus extrèmes. Inspiré du punk par sa démarche artistique, et reprenant certains codes du choc rock et du heavy metal, le black crée une atmosphère lourde et sombre avec des sons très saturés et distordus et des voix éraillées et écorchées criant souvent de manière assez aigue.

Ecouter Bathory, Mayhem et Emperor (attention, musique réservée à un public un minimum initié et ouvert).


Mastering : processus relativement complexe consistant à traiter un enregistrement (ou dans ce cas un live) et de paramétrer un peu plein de choses afin d’en faciliter l’écoute.


Headliner : mot anglais signifiant « tête d’affiche » et de plus en plus réutilisé en français à propos des concerts et des festivals.


Pogo : pseudo dance ou les gens sautent de manière plutôt désordonnée et surtout se poussent les uns les autres. Ça peut être impressionnant mais c’est la plupart du temps quelque chose de plutôt festif et bon enfant où la moindre personne qui tombe est aidée à se relever.


Circle Pit : Pogo où en plus de sauter et de se pousser, les gens courent en rond (dis comme ça fait très con… tappez plutôt ça sur Youtube pour vous faire une idée).


Mediator : Non, pas le médicament, l’objet permettant de gratter ou de pincer les cordes d’un instrument… à cordes ! (aussi appellé plectre ou pick)


Pit : Terme anglais pour la fosse. Les français l’utilisent souvent pour parler de l’endroit précis où se passe le pogo.


Riff : ostinato en musique classique, court motif musical joué de manière répétitive. Réécoute Smoke on the Water de Deep Purple où Seven Nation Army des White Strippes, tu comprendras vite.


Headbanging : danse consistant à effectuer des mouvements d’aller-retour ou de rotation avec la tête en rythme. Avoir les cheveux longs rajoute un effet « poney galopant » très classe.


Slam : appelé crowd surfing par noas amis anglos saxons, c’est une pratique qui consiste à se faire porter en position le plus souvent allongée par la foule d’un concert.


Wall of Death : mouvement de foulle lors duquel la fosse se sépare pendant un moment plus calme dans la musique ou une introduction avant de se refermer d’un coup quand la guitare rythmique ou la batterie reprends de plus belle, ou, en électro, au moment du drop (pareil, je vous conseille d’aller sur YouTube, les images parlent plus que les mots dans ce cas).



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