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Hors séries : Hypno5e ou la musique, ses langages, et ceux qui savent les parler

« La musique, c’est une langue. »

Vous avez tous déjà entendu cette phrase. Je ne suis pas totalement d’accord avec elle. La musique n’est pas une langue mais plutôt une famille de langues, au même titre que les langues dites « latines » par exemple.

Les différentes langues de la musique sont connues sous le nom de « genres » et pour les apprécier, il faut souvent les connaitre suffisamment et ainsi pouvoir les comprendre. Si un genre de musique ne fait pas partie de votre patrimoine culturel et que vous ne faites pas l’effort d’essayer de vous y ouvrir, vous n’allez probablement pas l’apprécier. Faites écouter un morceau de Debussy à un mec qui n’a jamais écouté que du Gradur. Il se fera probablement chier et n’appréciera que s’il réussit à comprendre ce nouveau langage. Ainsi, pour être touché par le message qu’un musicien vous passe, il faut pouvoir comprendre la langue qu’il parle, voir, son dialecte.

Parce que parmi les différentes langues, il y a des dialectes, des sous-genres. Et les ramifications s’étendent à l’infini.

Il se trouve que certaines langues expriment mieux certains sentiments que d’autres, ou ont plus de facilité à faire passer certains messages, pour diverses raisons.

Ainsi, le punk est préconisé pour cracher sur la société et provoquer l’opinion publique tandis qu’une balade est plus adaptée pour parler d’amour. Ça ne veut pas dire qu’on ne pas parler d’autre chose mais globalement, si on enlève les paroles de la musique, telle construction associée à tels instruments va souvent évoquer une chose plutôt qu’une autre.

Certains artistes se sont amusés à parler plusieurs langues dans leur œuvre. Certains en ont utilisé des différentes dans chaque album comme le regretté David Bowie. D’autres ont choisi de parler plusieurs dialectes dans le même morceau, en passant d’un genre à l’autre. Pensez à l’excellent Bohemian Rapsody de Queen.

Cet exercice est très complexe. Premièrement parce qu’on est souvent plus doué dans une langue que dans une autre et deuxièmement parce que, garder cohérence et fluidité en passant d’une langue à l’autre peut être un réel défit.


Mais personnellement, j’adore. J’aime les morceaux qui jouent avec moi, qui sont capables de me faire passer du rire aux larmes, de la mélancolie à la colère en l’espace de quelques minutes.

Et j’ai récemment découvert un groupe qui fait cela à merveille. C’est un groupe Français qui réponds au doux nom de Hypno5e, dont le troisième et dernier album Shores Of The Abstract Line est sorti récemment et qui nous propose une musique qui relève purement du génie.

Elle parle d’un côté un langage extrêmement mélancolique et émouvant, dont la magie provient notamment des mélodies acoustiques emmenées la voix du chanteur qui maitrise l’anglais, le français et l’espagnol (quitte à parler plusieurs langues, autant le faire jusqu’au bout !) et de l’utilisation inhabituelle de samples provenant de films, de vieilles interviews et de lectures de textes par leur propre auteur.

De l’autre côté, la même musique exprime la rage du désespoir, la violence de la tristesse, la puissance des regrets avec un metal brutal mais contrôlé et parfaitement dosé. Le texte parle de « fureur purifiée » et c’est exactement ce que les parties metal dégagent.

Le passage entre ces deux aspects d’une même réalité est toujours maitrisé et fluide, le tout nous donnant une musique d’une poésie boulversante. Cette musique me donne des frissons, me fait monter les larmes aux yeux.

Alors je vous conseille vraiment d’aller l’écouter. Oui, il y a du metal, et oui, ce n’est pas la langue musicale la plus facile à comprendre. Il faut savoir prendre du recul, se détacher de ses préjugés et être ouvert d’esprit. Mais j’ose espérer que les lecteurs d’Agora’ctu sont moins fermés et peureux que Christine Boutin.

Hypno5e est à la musique ce que Le Labyrinthe de Pan de Guillermo Del Toro est au cinéma. On a d’un côté un monde féerique et magique, bien que mélancolique (que le film permet de découvrir au travers du regard d’Ofélia). De l’autre côté, la dure réalité et la violence (incarnée dans le film par le franquisme espagnol).

A l’image de la réalité, nos émotions et les différents aspects de nos personnalités sont plurielles et diverses. Alors profitez de cette musique et de ces œuvres, qui parlent à plusieurs de vos facettes.


PS : Je n’ai pas encore vu Hypno5e en live. D’après ce que j’ai lu sur internet, le groupe livre de formidables prestations qui prolongent l’expérience proposée par la musique. Alors si vous avez écouté ce que fait le groupe et que vous avez aimé, je vous invite à faire comme moi et à aller les voir à la Batterie le 7 mai.



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